Peut-on profiter du meilleur d’un pays en ignorant son pire ? Une dizaine de dirigeants Khmers Rouges ont inventé une monstrueuse organisation : l’Angkar, dirigée par Pol Pot (grand admirateur de Staline et d’Hitler).
Le génocide du peuple Khmers par ses propres dirigeants sera en proportion plus important que celui des nazis, ce sera de plus un autogénocide ! Un quart de la population cambodgienne périra – par divers moyens, exécutions, sous-alimentation, maladies, travaux forcés-, i.e. près de 2 000 000 (oui, deux millions) de personnes - pour une population totale de huit millions. Toute la population sera visée : ouvriers, cadres, enseignants, intellectuels, diplomates, femmes et enfants, et même des Khmers Rouges ! Pour l’anecdote, étaient considérés comme intellectuels tous ceux qui parlaient une langue étrangère, ainsi que ceux qui portaient des lunettes, ce qui était considéré comme un signe d’intelligence.
Ainsi, l’ancien lycée français de Phnom Penh, à l’angle des rues 113 et 350, est devenu de 1975 à 1979 la prison la plus terrifiante des Khmers Rouges. Plus de 15 000 personnes y ont été torturées. Seuls 7 prisonniers et 4 enfants auront échappés au sort qui leur était promis, à l’arrivée des Vietnamiens libérateurs. Ces derniers filmeront leur entrée dans le camp. Le film qui nous sera diffusé reprend ces images, avec les corps agonisants des prisonniers qui n’auront pas pu être déplacés avant la fuite de leurs tortionnaires..
Source: http://www.epphoto.fr/category/reportages/cambodge/ |
Baptisé « camp S21 »
par les hommes de Pol Pot, ce dernier n’avait rien à envier aux camps nazis. Il
fallait à tout prix que les torturés avouent afin qu’ils puissent être achevés
dans le camp d’extermination de Choeung Ek (si ce n’était pas déjà fait). Les
gardiens avaient entre 10 et 15 ans ! Le tortionnaire en chef (alias Duch)
du S21, ex-professeur de mathématiques, a été reconnu coupable de crime contre
l’humanité.
Avec Yann, nous visitons les
anciennes salles de classe : certaines ont été transformées en salle
d’exposition photos où l’on voit les portraits des anciens prisonniers, d’autres
salles sont réservées à décrire les tortures, les gardiens, les dirigeants Khmers
Rouges, à exposer des crânes déterrés des fosses. Certaines salles sont restées
à l’état de geôles, de 0,8 sur 2m.
La période des Khmers Rouges
passe relativement inaperçue dans les livres d’histoires et la mémoire
collective, bien qu’elle impacte toujours le Cambodge, avec des familles
détruites, traumatisées, ruinées, et blessées (notamment par les mines anti-personnel
qui jonchent toujours une partie du pays..).
L’excellent livre de Loung
Ung, (D’abord, ils ont tué mon père,
éditions Plon) petite fille cambodgienne pendant ces 4 années de cauchemar,
dresse un portrait intéressant, et est en quelque sorte le pendant local du livre d’Anne Franck.
Nous terminons notre journée par
un tour dans la capitale, et visitons le Palais Royal. L’architecture Khmer
avec ses toits et ses dorures nous interpelle. Pourtant, à l’intérieur, les
bâtiments sont fermés à la visite, il faut les apercevoir par les fenêtres, et
la décoration intérieure est bien décevante : le ramage est bien loin du
plumage (sommes-nous les « plumés » ?). Dans la pagode, où 5000
dalles d’argent recouvrent le sol, une épaisse moquette rouge cache la beauté
du lieu, à peine 3 m² restent visibles… Le bouddha d’émeraude (en fait en jade)
est remplacé par sa copie en cristal (vous suivez ?), trône à 4 mètres du
sol où l’on ne peut que l’apercevoir. Le bouddha de 90 kg d’or, grandeur nature,
aux 2086 diamants incrustés, ne peut également qu’être aperçu, et l’on est
surpris du peu de sécurité qui l’entoure... Allez plutôt visiter le Palais
Royal de Thailande à Bangkok, bien plus impressionnant !
#NoteSurLaLangueKhmère :
La langue officielle du
Cambodge est le khmer, grammaticalement simple : il n’existe ni
conjugaisons, ni genres, ni articles,… Pour exprimer une action passée ou
future il suffit d’ajouter des adverbes (hier, demain,…). Par contre,
l’écriture est indéchiffrable, l’alphabet composé d’élégantes volutes issues du
sanscrit. Heureusement il y a beaucoup de
traductions en français et anglais. Attention cependant aux faux amis,
par exemple : « asseyez-vous » se dit « en kouille ». J’ai été étonné d’apprendre que tous les textes administratifs sont traduits en Français, et
que le mot « oui » se dit
« baat » par les hommes et
« chaah » par les femmes !
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